Opinion membre

L’avoir l’air autiste

Par Valérie Cloutier-Cadieux

« Tu n’as pas l’air autiste!/Elle n’a pas l’air autiste! »

Est-ce que cette phrase vous êtes familière? À moi, oui. Je rencontre des gens, je leur parle. Ma mère, elle, se contente de leur dire que moi et mon frère sommes autistes, sans avoir notre permission. Et cette phrase, cette phrase qui me brise le coeur, cette phrase qui est dirigée plus souvent vers ma mère (comme si soudainement je n’existais pas, comme si soudainement je n’étais qu’un accessoire, un robot, un bébé….) ….cette phrase qui me déçoit, sors de leur bouche. Je ne connais pas leurs intentions, mais sachant que les gens sont plus souvent condescendants qu’autre chose, je commence à me méfier un peu plus d’eux.

Mais…avoir l’air autiste? Qu’est-ce que cela veut bien dire? Devrais-je agir comme un bébé? Comme un robot? Devrais-je leur dire les choses que je sais ou ne sais pas faire? Et puis, comment peuvent-ils juger à quel point j’ai « l’air autiste » étant donné qu’ils ne le sont pas eux-même? Je me suis fait crier dessus pour avoir eu des moments non-verbaux, me faisant dire que je n’étais pas non-verbale comme mon frère, mais la vérité est que je peux le devenir pour un moment. Je ne me connais pas encore entièrement, car je n’ai jamais connu d’adulte autiste qui aurait pu m’en apprendre plus sur moi-même, sur des traits que seuls nous connaissons et vivons chaque jour, serais-ce ce que l’on appelle le mutisme sélectif? Je n’en suis pas certaine à ce jour. Mais revenons à nos moutons.
Les gens qui ne pensent pas que nous avons l’air autiste.

Je sais ce qu’est le problème.

La société qui est probablement en majorité des neurotypiques (donc non-autistes, non-dépressifs, etc.) parle de gens neurodivergents, essayant de nous démoniser, de faire peur aux gens en parlant de nous, disant des faussetés et des mensonges. Et cette peur qui se développe en xénophobie poussent les gens à l’action, souvent sous forme d’abus, d’intimidation. Et nous, on internalise cette haine, et alors, on se force à cacher ces traits qui font de nous qui nous sommes, afin d’avoir l’air plus allistique (non-autiste), voire même neurotypique, pour qu’eux, puissent enfin nous accepter, ou du moins nous laisser tranquilles.

Mais certains traits restent encore visibles. Comme notre besoin de routine. Pour moi, il y a un besoin de me stimuler, toujours avec de la gommette, (et je crois que beaucoup d’autistes ont encore ce besoin, mais ne le savent pas, ou ne savent pas ce que ce besoin est.) mais eux ne semblent pas voir cela en tant qu’un trait autiste. Eux, qui ne connaissent pas l’autisme parce qu’ils n’ont pas entendu nos voix. Certains s’étonnent que nous avons même un sens de l’humour!

Je crois alors qu’il est impératif qu’on se fasse entendre. Et que nos alliés, s’ils veulent bien s’appeler ainsi, que nos alliés élèvent nos voix, qu’elles puissent voyager plus loin, que les gens puissent enfin savoir la vérité.

 

«Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur. Elles ne représentent pas nécessairement les idées de l’ensemble des membres de Aut’Créatifs, ni ne sont une position officielle de l’organisme»

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