Lina Simahfoud

Pour commencer dans le vif du sujet, sachez que la vision que j’ai de l’autisme a beaucoup évoluée dans le temps.

J’ai toujours senti que j’étais différente. Depuis que je suis toute petite, je voyais bien que les autres enfants de mon âge n’étaient pas comme moi.

J’étais en 6ième année lorsque j’ai pu mettre un nom sur ma différence : Autisme ou TED (qui a été vite remplacé par TSA). Aujourd’hui, ces deux derniers termes me blessent, mais quand j’étais petite, je ne me doutais pas à quel point ils étaient péjoratifs.

À 12 ans, je ne savais pas trop quoi faire de cette information. J’avais juste l’impression qu’on me rappelait quelque chose que je savais déjà, mais en y ajoutant cette fois-ci un nom et des explications. On me répétait que ma différence n’était pas une « mauvaise chose » et que c’était juste ce qui me rendait si unique. Mais à chaque fois que je demandais en quoi j’étais « différente », on ne me donnait que des exemples très vagues.

Ce n’est qu’une fois arrivée au secondaire que j’ai fini par comprendre que ce n’était que mon cerveau qui avait sa propre manière d’apprendre et de fonctionner. Et aussi que ce n’était pas tout le monde qui en était arrivé à la même conclusion que moi…

Quand j’étais petite, je ne ressentais pas vraiment le besoin de m’identifier à mon identité autistique. Je voyais ça comme quelque chose d’acquis, qui faisait juste partie de moi. Je ne voyais pas plus de raison d’en être fière que d’en avoir honte ; je l’acceptais parce que je savais que, de toute façon, ça ne changerait jamais.

Mais une fois arrivée au secondaire, c’était différent : on ne s’adaptait plus à moi comme on le faisait auparavant dans les classes adaptées… Je découvrais la surprise dans le regard des gens à qui j’annonçais que j’étais autiste. J’entendais mes camarades utiliser le terme entre eux comme synonyme de « débile ». Je voyais le nom de ma condition utilisé dans les papiers du gouvernement parmi la liste des « troubles et handicaps mentaux ».

À ce moment-là, j’ai compris que l’idée que les gens avaient de l’autisme était loin de correspondre à la réalité… à ma réalité. C’est là que j’ai commencé à ressentir le besoin de m’identifier, d’en apprendre plus sur ce qu’était réellement l’autisme. Je cherchais un moyen de me réapproprier mon identité que la plupart des gens utilisaient comme bon leur semblait ; comme s’ils savaient forcément mieux que moi ce que ça voulait dire.

Aujourd’hui, j’ai juste envie de rétablir la vérité. Pas de démystifier un par un chaque stéréotype existant sur l’autisme en argumentant par son contraire ; je n’ai pas plus envie de faire de la discrimination positive que négative. Non, je veux juste rappeler que, au-delà des diagnostics, nous sommes avant tout des êtres humains. Et par le simple fait d’exister, j’espère montrer que ce n’est pas notre condition neurologique qui définit qui nous sommes.

Au plaisir de pouvoir peut-être collaborer avec vous dans cette mission.

Cordialement,

Lina Simahfoud